Comme j’ai une rencontre avec Lucie Rico en avril, j’ai voulu lire GPS en entier parce que c’est important pour moi de savoir à partir de quoi on parle. Je préfère dire maintenant ce que j’en ai pensé parce qu’après que j’aurai rencontré Lucie Rico je suis sûr à 98 % que je vais la trouver sympa et que je n’aurai plus le courage d’être honnête.

Je pense que GPS aurait plutôt dû s’appeler Google Maps, parce que la narratrice utilise en fait Google Maps sur un téléphone, et pas juste un GPS. Au début je pensais que l’objet principal du livre serait une sorte de GPS Garmin à ventouser sur le pare-brise d’une voiture, mais en fait c’est une application.

Je sais qu’on dirait un détail mais en fait c’est quand même déterminant dans la plupart des scènes et dans la façon dont le livre est construit.

La narration est lente et ne peut s’empêcher des détours superflus quand l’intérêt s’emballe.

Par exemple, après que l’hypothèse que l’amie de la narratrice est morte se matérialise réellement, on doit s’enquiller un flashback sur la relation amoureuse entre la narratrice et son mec. Il y a au moins cinq ou six autres enchaînements du même genre.

Moi j’aime quand un livre avance, pas quand il recule.

Il y a plein de petits détails dissonants et peu intuitifs quant à la perception de Google Maps, et contradictoires dans la diégèse.

Un exemple : la narratrice dit que le problème du réchauffement climatique ne se pose pas sur Google Maps, ce qui est plutôt faux car on peut bien voir un paysage se dégrader grâce à la fonction Timelapse, que la narratrice utilise plus loin dans le livre. On pourrait dire qu’il lui vient une pensée fausse à partir d’une pratique consciente.

Un autre exemple : la narratrice explique que Google ne photographie pas les visages des gens (plutôt, ils sont floutés) et par extension applique une politique stricte sur la prise en photo de scènes de crimes ou de vols (soit les photos sont supprimées, soit remplacées par une surface grise). Pourtant, elle peut voir plusieurs photos liées à une scène de meurtre.

Je trouve aussi étrange que le livre se construise sur la crainte de la narratrice à sortir, alors que la scène d’ouverture se déroule en extérieur. N’aurait-il pas été plus logique qu’elle ne se sente pas de venir à la soirée de fiançailles, et de construire à partir de cette impossibilité initiale ?

Et puis surtout, toute l’intrigue repose sur un procédé qui disparaît comme par magie : un point de localisation que la narratrice surveille 85 % du temps avant d’apprendre que sa propriétaire (et amie) était morte depuis le début. Donc quoi, le point n’existait pas ? La narratrice hallucinait ? Elle s’est créée un monde fantasmatique ? OK.

Je préfère ne pas penser OK à la fin d’un livre.

Je préfère penser : oui.

On se voit donc en avril.


Il y a ce type en short qui éteint les flammes dans son jardin avec une carafe pleine de l’eau de sa piscine.

Leur dieu est un corps cloué à un arbre.

Social media has been worthless for years

I likewise refuse to do the publisher’s job for them. I already did my job, and I think that if an agent or publisher doesn’t want to do the work of selling my novel, they should reject me up front.

Je suis d’accord avec à peu près tout ce qui est dit dans ce post. Il n’y a pas de mal à parler de ce qui est produit, mais personne ne comprend plus qui doit le faire, ni où, ni comment.

Toutes les façons de communiquer me semblent inutiles dès qu’elles ne sont pas : parler à un être humain.

La communication sur les réseaux sociaux est véritablement de plus en plus inefficace, car les ratios sont ridicules, c’est impossible de savoir qui est touché, ni si cela sera régulier d’une fois sur l’autre.

Se reposer sur ces outils est un leurre profond qui détruit à petits feux quasiment toutes les initiatives. Celles qui subsistent produisent un effet d’élection qui dupe tout le monde.

Il faut juste les bons humains qui parlent de la bonne façon à d’autres humains.

Par exemple, la boutique où je joue à Magic organise une soirée Commander par mois. Le coût d’entrée est de 5 €, il y a 24 places. C’est toujours complet, et elle réussit à vendre toutes les places simplement en parlant aux personnes déjà présentes à la fin de chaque soirée. Si quelques places restent libres, les joueurs en parlent à leurs amis, ou la boutique en parle à ses clients. Je ne la vois jamais utiliser les réseaux sociaux, car elle n’en a pas besoin. Il y a une bonne synergie entre : 1) ce que la boutique propose 2) qui elle veut toucher 3) ce que les joueurs y trouvent 4) le prix 5) la récurrence 6) le lieu.

Et c’est grâce à ce fonctionnement qu’elle peut aussi remplir les avant-premières au moins à 80 % alors que le coût d’entrée est de 35 €, soit 7 fois plus cher.

Si maintenant je prends mes livres.

Ils sont vendus à une échelle nationale, dans des centaines de librairies différentes que je ne connais pas, à un prix que je n’ai pas fixé, avec des arguments de vente que je n’ai pas choisis, pour des lecteurs que je ne connais pas.

Et on voudrait que je fasse la communication d’un produit où tout est choisi à ma place sauf ce qu’il y a dedans.

Je touche 10 % des ventes pour écrire un livre. Si je dois communiquer dessus, donnez-moi 10 % de plus et je le ferai sans doute volontiers, mais avec mes outils, et mon approche.

Sur un livre de 20 € j’en touche 2, donc c’est presque sain que je ne veuille pas en faire plus qu’avoir déjà écrit tout le putain de livre pendant 3 ans. Je n’ai même pas envie d’y réfléchir : je n’en ai pas les moyens.

Si un jour j’écrivais un livre en me demandant pour qui je l’écris, où je veux le vendre, à quel prix, avec quels arguments, et à quelle fréquence, je pense que mon monde changerait.

Peut-être qu’il est temps que mon monde change.

Cameron Winter - Drinking Age

I don’t know if I’m
Ever gonna stop
Reminding myself
Everything is lying


Le monsieur à côté de moi au passage piéton disait à voix haute que 99 % de la population mondiale n’irait pas au paradis. Il a dit que Moïse a écrit dans ses Commandements qu’il ne fallait pas mentir, et il a dit que 99 % de la population mondiale n’irait pas au paradis à cause du mensonge.

J’ai eu envie de pleurer parce que j’ai réalisé que moi non plus je n’irai pas au paradis à cause du mensonge.

Toujours pas compris pourquoi les auteurs français choisissent des pseudonymes aussi chiants que leur nom d’origine. Quitte à choisir pourquoi ne pas partir sur Séphiroth, Waluigi ou Optimus Prime ? Le catalogue est illimité. Vous pouvez vous appeler Doliprane 3000, Diabolo Kiwi ou Neo Cortex et vous préférez Jean-Michel Gentil, c’est dingue.

Et encore Jean-Michel Gentil c’est presque pas si mal.

Tout le monde se plaint de l’immédiateté, mais personne ne travaille vraiment à en sortir : quels outils, quelles stratégies ? On a capté depuis un bon moment que les choses ne fonctionnaient pas, maintenant il est peut-être temps de s’y mettre.

En écrivant ma pensée, elle m’échappe quelquefois ; mais cela me fait souvenir de ma faiblesse que j’oublie à toute heure, ce qui m’instruit autant que ma pensée oubliée, car je ne tiens qu’à connaître mon néant. – Pascal, Pensées.


Comme j’écris ici depuis 13 ans, je m’amuse à penser parfois que je suis peut-être une des choses les plus stables de la vie des personnes qui me lisent depuis le début.

C’est fou de faire la même chose pendant 13 ans, et en même temps pas du tout la même chose, et en même temps peut-être pas fou du tout.

Je reviens de chez ma grand-mère où je pouvais vivre dans le calme, et mon appartement est tellement plein du bruit des autres que je n’arrive plus à supporter. Je suis rentré et presque aussitôt j’ai pensé : je veux partir.

Je fais le puzzle 1 pièce Leroy Merlin pour savoir si je suis un robot et le résultat après l’avoir réussi est que je suis bloqué. Je ne sais même pas si je suis un robot et je ne peux donc pas non plus consulter leur offre de casques anti bruit.

Peut-être que je réussis trop bien le puzzle 1 pièce Leroy Merlin pour être humain.

J’aimerais faire un autre métier.


Safia Sofi ouvre la porte et marche dans l’entrée en faisant le moins de bruit possible. Toutes les pièces sont dans le noir relatif des grandes villes.

Elle passe devant la cuisine pour rejoindre sa chambre.

Tu étais où ? demande Leblanc.

Les lumières extérieures dessinent les contours de son visage et de son buste à table. Elle attend dans cette position depuis qu’elle a remarqué que Safia Sofi n’était pas dans sa chambre. En ville, dit Safia Sofi.

Leblanc dit : tu ne dois pas sortir sans me prévenir. Je ne risque rien, dit Safia Sofi. Ne sors plus sans me prévenir, dit Leblanc. Safia Sofi continue vers sa chambre sans lui répondre.

Leblanc dit : bonne nuit, et l’entend monter les escaliers sans dire bonne nuit.

Safia Sofi s’enferme dans sa chambre et s’allonge à la renverse sur son lit. Elle pense à son rendez-vous avec Daisuke et à l’inconnu qui est entré avec son chien dans la pizzeria. Elle se souvient avoir pensé en le voyant entrer que son aura ne ressemblait à aucune autre.

Elle se souvient aussi avoir pensé que le chien n’avait pas l’air d’un vrai chien.

À la fin elle se souvient surtout que sa pizza n’était pas géniale et qu’il y a presque un truc suspect au fait que Daisuke l’ait invitée à manger .

Parce que Daisuke a clairement l’argent pour l’inviter dans une pizzeria où les pizzas sont au moins correctes.

Safia Sofi pense qu’une pizza correcte n’aurait pas coûté beaucoup plus cher que cette pizza nulle parce que le commerce de la pizza dans son ensemble se situe dans une fourchette qui va de 8 à 20 $, et qu’il y a comme une intention hostile volontaire de la part de Daisuke d’avoir choisi celle à 8 plutôt que celle à 20.

En fait Safia Sofi réalise que tous les éléments de cette soirée sont des anomalies et qu’une sorte de menace de mort s’est ancrée depuis dans son esprit.

Elle réalise qu’en disant je ne crains rien à Leblanc devant la cuisine tout à l’heure elle lui mentait mais qu’elle n’en était pas encore consciente.

Elle réalise que son corps tremble sur le lit.

Elle pense : je suis en danger.


L’adolescente dans la maison d’en face a un drapeau breton accroché sur un des murs de sa chambre. C’est compréhensible vu la zone géographique mais bizarre vu l’âge.

Anti m’a offert le Lego 71431 Ensemble d’extension bolide de Bowser, et Cécile le Lego 76996 Le robot gardien de Knuckles.

Il s’agit d’animer ce qui ne l’est pas.

Il faut deux mains pour bouger un bras.

Je pourrais écrire une nouvelle histoire avec les mêmes personnages.

Ton livre peut être coup de coeur d’une librairie et ne plus être vendu dans cette même librairie à peine un an plus tard. Pas besoin d’ennemis quand on a ce genre d’amis.

Ma grand-mère a une feuille intitulée ANNUAIRE AGRI-LOISIRS en WordArt arc-en-ciel avec des noms et des numéros écrits dessus. Si le nom et le numéro sont barrés, c’est que la personne est morte.

Un catcheur qui aurait comme nom Happiness Manager.

Le seul sens que je trouve à vivre, c’est celui que je trouve à écrire.

my computer is a home that my friends can visit


Je passe la plupart de mes soirées à regarder des gens qui chantent sur YouTube et à pleurer devant. Je suis pris par une émotion totale et permanente. Je ne comprends pas d’où viennent toute cette peine ni tout cet amour. Je crois que j’ai été privé très longtemps d’un pouvoir immense que je retrouve à force d’y croire. Je peux tout ressentir. Je peux tout voir. Je parle une langue de dieu. Je marche sur l’eau. Il me suffit d’une main pour tout saisir. J’ai visité le monde entier. Je reviens du futur. J’ai une épée pour trancher les démons. Mon trône est au fond d’une citadelle de glace. Les spectres m’aiment parce que je les écoute. Je ne suis pas là pour vous faire plaisir. Je ne suis pas là pour croiser les bras. Il y a un chemin mais je ne marche pas dessus ni n’attends à côté. N’essayez pas de me trouver. N’essayez pas de me parler. Il n’y a rien à voir. Je suis une voix dans votre tête. Je suis un ange. Je suis le chemin.

Yseult - TUNING

When you shine your light
I feel so good

Friends are home

But, she was there.
And she stayed by my side.
And eventually, we talked.


L’année qui vient de se terminer n’aura pas été facile. J’ai été mal souvent, j’ai essayé tant que j’ai pu. J’ai découvert qu’il n’était pas nécessaire de se tenir aux contrats qu’on signe. J’ai compris que mon langage était incapable de me défendre, mais que celui des autres était toujours aussi efficace pour m’attaquer. J’ai été déçu par mes parents, une nouvelle fois, d’une autre façon, mais j’ai enfin rencontré toutes les personnes qui m’attendaient derrière cette déception. J’ai compris que je n’étais pas le bienvenu parfois. J’ai compris qu’ouvrir la porte d’une maison ce n’est pas ouvrir sa maison. J’ai cru que je pouvais tout réparer. J’ai découvert que chaque douleur de mon corps cachait une émotion. Mes émotions sont toutes plus anciennes que ma mémoire. J’ai arrêté d’imaginer un monde parfait. J’ai compris que certaines choses n’appartenaient qu’à moi, et que c’est une chance immense parce que personne d’autre ne peut les abimer. J’ai attendu dans le froid. J’ai marché quand j’en avais l’occasion. Je me suis caché dans des lieux parfaits. J’ai construit de nouveaux Lego et les ai rangés sur la même étagère. J’ai été blessé d’être nul et ignoré. J’ai été blessé d’être un enfant. Je me suis senti à part et cette sensation n’ira pas en s’amenuisant, je l’ai compris. J’ai fait de mon mieux pour être normal. Des fois je n’ai pas su faire semblant. J’ai écrit même si j’avais honte de ne pas savoir écrire mieux. J’ai écrit même si tout le monde était poli avec moi. J’ai écrit ici. C’est ce que je continuerai à faire. Il suffit d’un endroit où être sincère : pas besoin de souffrir partout.